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Libération
Reportage

«Ça roule tout seul, cette grève!»

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Hier, gare Saint-Lazare, l'ambiance dans les AG était à la lutte.
publié le 28 novembre 1995 à 9h53

Dix heures, gare Saint-Lazare, à Paris. Une foule se presse devant les panneaux d'affichage tandis qu'une voix doucereuse prévient par haut-parleur que, «en raison de mouvements sociaux, le trafic est totalement interrompu en direction de Cergy et de Mantes-la-Jolie». Ça grogne. De jeunes appelés, sacs sur l'épaule, tournent en rond. Trois trains seulement, pour la journée, sont prévus à l'arrivée. Sept au départ.

10h30. Quai 27. Les cheminots en grève grimpent au cinquième étage d'un gros bâtiment parallèle aux voies. L'assemblée générale des «ADC» (agents de conduite) démarre dans la bousculade. La première depuis le début du conflit. «La grève se reconduit spontanément depuis trois jours. J'ai jamais vu ça en trente-cinq ans de maison. Ça roule tout seul!», s'émerveille un participant. Une soixantaine d'hom- mes s'écrasent les pieds dans une petite salle. «C'est toujours comme ça les premières AG. Tout feu, tout flamme! Après, pfff...» Armand, large sourire, fait mine de baisser les bras. Sur le revers de sa vareuse, il porte un badge bicolore rouge et blanc. «Décembre 1986. Plus jamais comme avant». La grande grève de l'hiver 1986-87 plane au-dessus de la réunion. Neuf ans après, personne n'a oublié les séquelles: les militants CGT virés par leur fédération et la création d'un groupe local des ADC qui, trois ans durant, a tenu la dragée haute aux organisations syndicales. La CGT apparaît presque modérée. Plus que la CFDT en tout cas, qui compte dans ses r