Armand, «la haine de classe au coeur»
Conducteur de trains à Paris, 50 ans.
Cette fois, c'est la der des ders. La dernière grève à laquelle Armand aura participé. Dans deux mois, c'est la quille. La retraite à 50 ans, comme pour tous les agents de conduite de la SNCF.
Recruté en 1961, comme apprenti, à l'âge de 15 ans, «par vocation», dit-il, Armand les a toutes faites, les grèves. «J'ai la haine de classe vissée au coeur», confesse-t-il. Syndiqué durant trente ans à la CGT, il ne l'est plus depuis 1986. Depuis le précédent gros conflit, qui avait vu naître une coordination aux dépens des syndicats.
La fédération n'a pas apprécié le soutien apporté au comité de base. Armand est aussi le dernier cheminot à avoir reçu son «autorisation de chauffeur sur locomotive à vapeur», touché le béret et les lunettes noires, le 30 novembre 1965. A Batignolles. Comme dans la Bête humaine avec Jean Gabin. Mais de loco à vapeur, il n'en conduira point. L'époque à Gabin est passée.
Pendant les trois semaines de cette grève, avec sa silhouette de grand escogriffe, Armand s'est «battu» contre le contrat de plan, pour que les futurs cheminots conservent la retraite maison, et surtout, surtout, contre le plan Juppé, contre le «mépris dont a fait preuve le gouvernement». Il a participé à toutes les assemblées générales. Avec sa voix qui porte.
Et son sens des formules. Quitte à agacer, parfois, ses pairs. «Armand, tais-toi! Tu prends toujours la parole.» Lui dit aujourd