Mardi soir, en réunion privée sous les combles du théâtre de la Cartoucherie, à Vincennes, ils attendaient son avis. Six personnes, sept peut-être, des juristes, des responsables d'association. Pouvait-on organiser une conférence de presse? Avant la manifestation de mercredi, ou après? Que voulaient faire les familles? Qu'en pensait-il lui-même? Doro demandait des précisions, réfléchissait, répondait. Ils étaient assis autour d'une table, Doro se tenait à l'écart, vers la sortie. Ils avaient des papiers, des dossiers. Doro, un téléphone portable.
Doro Traore, l'un des cinq porte-parole des familles de Saint-Bernard, est un «mauvais dossier»: émergé de la foule des foyers de Paris, débouté du droit d'asile, sans papiers, rescapé des contrôles d'identité, sans travail, célibataire, et, ces dernières semaines, arrêté quatre fois, relâché quatre fois, sans doute par hasard. On ne lui a jamais fourni d'explication. La dernière fois, juste avant que la police le laisse repartir, il a signé un document de deux pages. Sans savoir ce qu'il avait ainsi accepté. Les arrêtés de reconduite à la frontière comportent au moins trois pages, ce n'est donc pas ça, lui ont dit plus tard les avocats.
Pour Doro, tout ça semble n'avoir pas grande importance. Depuis le début du mouvement des sans-papiers, les policiers l'ont évacué des quatre coins de Paris. Il a été menotté, transporté dans les fourgons de la préfecture, placé en garde à vue, et en rétention. Il est toujours arrivé à revenir où il v