Georges lui avait bien dit, à Jean-Louis. «Un jour, tu verras, il faudra mettre le costume pour un enterrement.» Il avait raison. Pour Georges, 39 ans, fossoyeur au cimetière de Trinquetaille, le grand jour, c'était hier: on inhumait Jeanne Calment, 122 ans et doyenne de l'humanité, dans un petit cimetière d'Arles, de l'autre côté du Rhône.
Georges est descendu dès 7 heures du matin, dans le caveau gris anthracite des familles Gilles-Calment-Billot, histoire de faire un peu le ménage. «Ils sont déjà six là-dedans, explique le fossoyeur. Le père, la mère, le gendre, la fille, le petit-fils et le neveu, je crois. Comme le dernier est arrivé en 1964, ça ne sent plus rien.» Simone jette un oeil au trou. Elle a bien connu le petit-fils, Frédéric Billot, mort dans la fleur de l'âge d'un accident de voiture. Elle travaillait dans une maternité et il venait la voir quand il avait mal aux oreilles.
On voyait Jeanne aussi, quand elle était plus jeune, enfin quand elle était moins vieille. «Le temps de remplir un arrosoir, sourit Georges, elle était déjà au caveau. A 112 ans, c'est pas mal.» Georges a scellé des chevrons au-dessus des cercueils, et construit, plié en quatre, un plancher, «pour faire propre», dans une chaleur de four. «On m'a dit, "et si on mettait un tissu provençal? "Et pourquoi pas des bougies, j'ai répondu. C'était juste une grand-mère.»
Pendant que Georges cherchait une bonne raison pour éviter d'enfiler son costume, une brève cérémonie a rassemblé la famille très élo