Est-il légitime que des hommes parlent du viol ?
J.-P. SARTRE. Quand un homme viole une femme, ils sont deux, et tous deux doivent en témoigner.
D'abord, où commence le viol ? Dès qu'un homme insiste pour coucher avec une femme et qu'elle refuse, il devient agressif, et cette agressivité peut se terminer par un viol : c'est un cas qui se rencontre même entre des gens mariés. On peut même se demander si l'acte sexuel n'est pas normalement un viol consenti, le corps qui se refuse éprouvant un plaisir particulier à faire l'objet d'une violence. Une autre question se pose alors : est-ce que le violeur a besoin de penser qu'il donne du plaisir à la femme ou, au contraire, prend-il plaisir à sentir qu'elle souffre de cette brutalité ?
Pour l'homme, l'acte sexuel est-il toujours, fût-ce d'une manière masquée, une sorte de viol ? C'est un problème auquel il appartient aux hommes de répondre, le viol étant rarement perpétré par des femmes (cela arrive cependant. En Angleterre, pendant la guerre, une vingtaine de W.A.C., depuis longtemps frustrées, attirèrent dans leur baraquement un jeune lieutenant et lui enjoignirent de les satisfaire. Il s'exécuta d'abord de bonne grâce, mais lorsque, épuisé, il tenta de s'échapper, elles le malmenèrent au point de lui casser un bras).
La question est très importante : si, dans toute pénétration, il y a, comme je le pense, un élément d'agressivité, alors les femmes ont raison de penser que participer à un acte sexuel avec un homme, c'est composer avec le pouvoir machiste.
Cette tendance machiste peu