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Portrait

«Tout ça n'était pas prévu, je vais naviguer à vue». Yves Cheère va continuer à travailler chez Renault au Mans.

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publié le 14 avril 1998 à 1h00

Le Mans envoyé spécial

Yves Cheère dit que c'est la fatigue, s'il a du mal à trouver ses mots. L'effet de surprise doit y être pour quelque chose, l'émotion aussi. «Tout ça n'était pas prévu, je vais naviguer à vue. Avant les élections, je n'avais rien préparé.» Le voilà, «impressionné», élu conseiller régional LO dans la Sarthe (Pays-de-la-Loire) avec 5,87% des voix. Il a bien l'expérience de l'organisation des meetings, les prises de parole dans sa CGT de syndicat, «ou devant le patron», mais là, «le conseil régional, c'est... c'est nouveau».

«Je ne suis pas un politique.» Après vingt ans de militance, et autant sur les chaînes de montage chez Renault-Le Mans et Renault-Billancourt, Yves Cheère, 41 ans, «ouvrier de fabrication», vient d'accéder à l'impensable: «Au Parlement régional, j'essayerai de servir de levier pour les travailleurs. Pour dénoncer ce qui s'y trame.» Les mots lui viennent lentement, comme pour se persuader de leur réalité. Se convaincre qu'il va falloir «s'organiser», aller «annoncer à la direction de la Régie» que le lendemain on posera un jour de congé pour se rendre à Nantes, au conseil régional: «Je me suis renseigné, j'en ai pour une heure et demie de train.» Car il ne voit pas pourquoi sa vie basculerait, «du jour au lendemain»: «Je veux continuer à travailler chez Renault. Parce que c'est ma place. Je ne me considère pas comme un politique, mais comme un travailleur. Les jours de session, je n'irai pas faire mes pièces à l'usine; mais, entre-tem