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Libération

SPECIAL MAI 1968. Ce jour là, dimanche 26 mai. La table trop longue de Grenelle.

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Et commencent les négociations. Pompidou d'un côté, les syndicats de l'autre. Enlisements,doutes, menaces... Dix millions de grévistes sont à l'affût.
publié le 26 mai 1998 à 2h09

C'est aujourd'hui dimanche, les partenaires sociaux sont enfermés depuis hier 15 heures au 127, rue de Grenelle, dans l'ancien hôtel du Châtelet, au ministère des Affaires sociales. Pierre de taille, lambris clairs, cour pavée de trop gros calibre. Le ministre en exercice, Jean-Marcel Jeanneney s'y fait petit, Michel Debré, le ministre des Finances n'a pas été invité (du coup, il rédige sa lettre de démission, mais l'heure n'est pas aux caprices), Georges Pompidou a le teint gris, le sourcil crispé, mais l'oeil est vif, il a préparé la discussion avec sa garde rapprochée, Edouard Balladur et Jacques Chirac. Georges Séguy, avec Benoît Frachon et Henri Krasucki, conduit la délégation de la CGT, Eugène Descamps celle de la CFDT, André Bergeron celle de FO et Paul Huvelin dirige l'équipe du CNPF où figure M. Peugeot. La CFTC, la CGC et la FEN sont également représentées, la FNSEA n'a droit qu'à un «observateur». L'acoustique est mauvaise, la table trop longue, chacun doit se contorsionner pour s'adresser à celui qui ne lui fait pas face, mais bon, le climat est détendu.

La France est en week-end, la France est en grève. Dix millions de grévistes, sur leurs lieux de travail occupés, à la maison ou à la plage, ont l'oreille collée au transistor pour suivre ces débats à huis clos, et tenter de peser sur leur déroulement. Dès les premières heures, des délégués prennent l'habitude d'un petit tour dans le grand hall pour donner des nouvelles du débat aux micros et caméras tendus. Benoî