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Libération

Jospin, premier bilan (6 et fin): l'image. Scénariste de sa modestie.

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publié le 2 juin 1998 à 4h48

Premier décor: le perron d'un palais national, par une belle journée

de printemps. Un homme pris comme par surprise par les caméras, qui hésite, puis explique, la parole mal assurée: «Le Président a décidé de me nommer Premier ministre et j'ai accepté.» Deuxième décor: il y un mois, dans un Airbus A 320, de retour de Nouméa. Entre deux fuseaux horaires, un Premier ministre en pyjama, assis sur l'accoudoir, entreprend les journalistes pleins de sommeil sur la TVA, l'euro, sa politique, sa méthode.

Mécanique complexe. Simplicité, désacralisation, improvisation ­ spontanée peut-être, mais toujours réfléchie. Lionel Jospin souffle sa première bougie en metteur en scène de son pouvoir, en scénariste de sa propre histoire. Il séduit, et bien au-delà de ses troupes, comme l'a démontré l'enquête Libération-CSA (1). Couleurs, sons, impressions, expressions: le jospinisme est autant un style qu'une politique. Et, outre un contexte économique et politique porteur, cette séduction est le produit d'une mécanique personnelle complexe, qui lui permet de marier deux registres que, trop souvent, les responsables politiques ne parviennent pas à faire vivre ensemble: la fonction et l'homme, l'autorité et le «naturel».

L'autorité confiante Jospin a une forte conscience du poste qu'il occupe. Comme Premier ministre de cohabitation, sa légitimité n'émane pas du président de la République, mais directement des électeurs. Et il a su diffuser et installer cette idée, au point d'inspirer une sorte de cr