La fonction crée la marionnette. Au début était un «Yoyo» un peu
nunuche traversant la campagne présidentielle de 1995 dans sa voiture jaune. Puis ce fut la dissolution et, dès septembre 1997, l'arrivée sur le petit écran de Canal + d'un «Lionel» sûr de lui et dominateur. Matignon veut-il faire passer le Premier ministre pour un grand modeste, responsable d'une équipe travailleuse, conviviale et près du peuple? Et le voilà en chemise et veste sur le dos, tutoyant tout le monde avec un mot d'ordre à la bouche («Il n'y a pas de méthode. On fait notre taf») repris en choeur par les ministres qui s'encensent les uns les autres. Martine Aubry à Jospin: «Tu fais un superboulot.» Jospin: «Ton plan sur la Sécu m'a scotché.» Aubry parlant de Dominique Strauss-Kahn: «Son budget est canon. Tu le lis comme du James Ellroy.» Concurrence. Au fil des conflits, des réformes, de la baisse du chômage, les Guignols vont étoffer leur «Lionel». A leur loupe grossissante, ils arrivent à décortiquer cette fausse modestie du Premier ministre, sa duplicité pour emballer les mesures gouvernementales afin d'en amortir le choc, son côté donneur de leçons. Mais voilà, le hic de leur héros, c'est d'être en concurrence avec des responsables de droite qui, eux, arrachent le rire, tant la réalité dépasse la fiction. Jospin n'est pas, d'emblée, un rigolo. Comment pourrait-il l'être face à un Jean Tiberi ou à un Jacques Chirac?
C'est donc par petites touches que les Guignols ont dû chercher les failles du pe