Ce n'est pas le souvenir qui importe, mais les manières charmantes, angéliques et gourmandes, avec lesquel-les Faudel sait l'enrober. Il n'aurait pas les yeux brillants, les jambes tremblantes sous la table d'un grand café de Pigalle, on jurerait qu'il se fait prier pour conter une fois de plus cette scène d'ensorcellement ordinaire qui fonde son histoire de chanteur de charme: en 1996, sur une scène du printemps de Bourges, le garçon du Val-Fourré tenait avec excitation son rang de jeune espoir des banlieues, quand il est tombé comme une pierre dans le public en chantant Tellement je t'aime. Les jeunes filles du premier rang ne lui ont pas laissé le temps de souffler. En une fraction de seconde, elles étaient sur lui, le pressaient à l'étouffer et lui arrachaient sa chemise. «J'étais KO, dit-il en baissant les yeux, je n'arrivais pas à reprendre mes esprits. Je pouvais à peine chanter, je ne comprenais rien à ce qui m'arrivait.»
Il a signé dans la foulée, à 18 ans, un contrat avec une multinationale du disque pour devenir, en moins de deux ans, la première vedette beur dans la saga du raï. Il voudrait faire l'étonné mais le philtre de ses yeux clairs ne trompe personne. «A 12 ans, il disait: "Je serai une star du raï; et il savait où il allait, raconte Rachid, son cousin des cités de Mantes-la-Jolie. Les filles se battaient déjà pour lui. ça n'a jamais cessé et c'était impressionnant, elles se griffaient, se cognaient, s'arrachaient les cheveux" De vraies bagarres, elles éta