Le vigile s'énerve. «C'est la préfecture, ici. Pour voir le recteur, eh ben, il faut aller au rectorat.» Ce n'est pas loin, mais la petite troupe de Léon-Blum s'est trompée d'entrée. Faire blocus ne sert à rien. Ils sont une cinquantaine ce mardi, à 500 mètres de leur lycée. Un établissement enfoui sous les arbres, avec vue sur les canards du lac de Créteil. Un lycée propret, avec pelouses. Pas de quoi en apparence déclencher une lame de fond gréviste. Mais, à Blum, on suit depuis lundi le mouvement dans toutes les classes, dans le désordre, avec enthousiasme, en alternant heures de grève et de cours. «Il est déjà 3 heures. Qu'est-ce qu'on fait maintenant?» Ils traversent l'avenue, bloquent des automobilistes paniqués et debout sur les freins. Anne prend les choses en main. «On se retrouve à 16 heures au bahut.» ça c'est l'officiel. Pour l'officieux, elle s'adresse à ses copines uniquement: «En attendant, on va à Soleil.»
Godzilla contre la manif. Le centre commercial de Créteil-Soleil est juste de l'autre côté du lac. Un quart d'heure de marche pour Anne, Fatima, Gwendoline et leurs copines. «On a décidé de continuer les cours, dit stratégiquement Anne. On s'arrête uniquement pour des actions comme celle-là ou alors pour les manifs à Paris. Pas question de glander entre deux opérations. Bon, là, c'est différent, l'action est annulée.» Le mot d'ordre est suivi à la lettre depuis le début, mais, pour certains, la militance se joue uniquement dans les allées de