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TRIBUNE

Kanaks au zoo

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En 1931, 111 Kanaks furent exhibés à l'Exposition coloniale. Une honte refoulée.
par Christian TORTEL, rédacteur en chef adjoint de RFO Nouvelle-Calédonie.
publié le 6 novembre 1998 à 15h56

La sortie du livre de Didier Daeninckx Cannibale (éditions Verdier) retrace un épisode de l'histoire de la Nouvelle-Calédonie. En 1931, cent onze Kanaks sont exhibés comme «cannibales authentiques» à l'Exposition coloniale de Paris. Plusieurs centaines d'«ambassadeurs» des colonies africaines et asiatiques font le voyage. L'Empire français est à son apogée. Pour les Calédoniens, ce sera le voyage de la honte. Les uns seront échangés contre des crocodiles d'un zoo de Francfort, les autres resteront au jardin d'Acclimatation de Paris, obligés de jouer leur rôle, mangeant viande crue et dansant en criant comme de prétendus «sauvages».

Didier Daeninckx, ému par un séjour sur le Caillou, retrace cet épisode longtemps méconnu. Lorsqu'on lui commande, célébration du 150e anniversaire oblige, un texte sur l'abolition de l'esclavage, il réagit par ce texte bref, écrit trop vite, certes, mais terriblement efficace. L'auteur d'une trentaine de romans policiers enfourche ainsi son cheval de bataille depuis Meurtre pour mémoire en 1984: la «réinscription» de la mémoire collective. Cannibale sort de l'ombre un épisode historique tragique, aux retombées actuelles, selon la thèse de Didier Daeninckx: les «événements» de la décennie 80 y trouveraient leurs sources. Surtout, il nous confirme que la Nouvelle-Calédonie n'est pas seulement une terre d'enjeux politiques et culturels mais aussi de recherches historiques.

Enjeux politiques. L'accord du 5 mai 1998 signé à Nouméa par L