La crainte de favoriser, fût-ce par effet pervers, la progression électorale du FN a confiné l'action contre le racisme à la contestation idéologique, à l'appel aux valeurs républicaines et aux calculs politiciens. Il est urgent d'enrayer la portée concrète du discours raciste. Sans la mise en place d'un dispositif volontariste, les mesures envisagées par le gouvernement lors du Conseil des ministres du 22 octobre (1) ne feront qu'aggraver la faillite d'une politique d'«intégration» des immigrés qui concourt en fait à leur marginalisation.
La législation actuelle est à la fois inappliquée et inadaptée. La charge de la preuve ne devrait plus incomber aux seules victimes, et la définition légale de la discrimination devrait inclure les pratiques qui, sans intention de nuire, engendrent des inégalités «raciales» ou ethniques. Mais il faut aussi rompre avec les sempiternelles justifications des inégalités par la fatalité de la crise ou par les caractéristiques des victimes, généralement soupçonnées d'utiliser l'accusation de racisme pour masquer leurs propres insuffisances. Il faut cesser de considérer comme anecdotique le récit des exclusions, des humiliations, des plaisanteries et des multiples formes de «harcèlement racial» quotidien. Il faut, enfin, accepter de prendre au sérieux les témoignages des victimes, systématiquement suspectées de mensonge, d'exagération ou de paranoïa.
On sous-estime les effets sociaux catastrophiques que la tolérance résignée à l'égard des discrimin