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Libération
Interview

René Rémond, historien. «Il n'y aura pas de grand centre».

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publié le 6 février 1999 à 23h38

René Rémond, historien, est président de la Fondation des sciences

politiques.

François Bayrou a pris la décision de conduire une liste autonome, pensez- vous qu'il y a place pour une telle liste dans le paysage politique français?

Il faut distinguer entre, d'une part, la pertinence et la légitimité d'une liste, et son audience d'autre part. Car, s'il y a fort à parier que cette liste ne fera pas mieux que celle conduite par Simone Veil en 1989, elle est parfaitement justifiée. Dans un scrutin proportionnel, ne pas être présent, c'est consentir à sa disparition, renoncer à son identité.

Le centre est un courant politique qui accepte mal la coupure radicale du corps électoral en deux blocs irréductibles et antagonistes. Les centristes se sentent mal à l'aise à droite, où ils côtoient des gens dont ils se sentent plus éloignés que d'autres du camp d'en face. C'est le mode de scrutin qui les a contraints à choisir leur camp mais ils sont malheureux, à plus forte raison dans le cadre d'une élection européenne où leurs différences par rapport à leurs partenaires apparaissent encore plus. L'idée de se ranger derrière Philippe Séguin, leader du «non» à Maastricht, c'est accepter de mourir. Il faut admettre qu'il y a une composante politique plus à droite qu'à gauche mais qui, du fait de son corps même, ne peut aller au-delà d'une alliance tactique avec le reste de la droite. Ce n'est pas de l'opportunisme.

En raison des institutions de la Ve République et du mode de scrutin législatif,