Strasbourg, de notre correspondante
Longtemps, ce fut la première image de Strasbourg offerte au visiteur venu d'Allemagne: des militaires en manoeuvre sur le stand de tir de l'armée, situé le long du Rhin. Une piqûre de rappel de l'histoire en guise d'accueil. La frontière existait encore, avec tous les signes distinctifs les guérites, les képis et les drapeaux de l'entrée en territoire étranger. Cinq décennies après la fin de la guerre, le pont qui relie Kehl (Allemagne) à Strasbourg (France) a été débarrassé de l'essentiel des guérites, des képis, et on a ajouté un drapeau: celui, étoilé, de l'Europe. Les tirs se sont tus.
No man's land. Mais si l'accueil est moins martial, l'arrivée sur la ville reste aussi peu avenante. Le glacis militaire est devenu un no man's land, désormais accolé aux friches des anciennes industries du port du Rhin. C'est une balafre urbaine, sur une route saturée de poids lourds, qui conduit vers la «capitale de l'Europe». «Cette entrée est indigne. Il y a peu de sujets de consensus absolu entre les Strasbourgeois, mais celui-ci en est un», note Roland Ries, le maire (PS) de la ville.
D'où l'idée, à la fois banale et audacieuse, d'unir de chaque côté du Rhin Strasbourg et Kehl en reconstituant un morceau de ville avec équipements publics, jardins, commerces, habitat et loisirs. Banale, car Strasbourg n'est pas la première ville à rêver de se greffer un coeur neuf sur des ruines industrielles et militaires. Audacieuse, car il s'agit de rassembler de