C'était en 1995, l'année où les défilés redevinrent à la mode, au moment de la collection d'automne. Portée par les manifestations contre le plan Juppé, l'extrême gauche endosse un nouvel habit. Elle se rebaptise «gauche radicale». Une divine surprise, ces grèves de novembre-décembre contre le plan Juppé. Le mouvement social, appelé de ses voeux par la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), renaît, avec, pour la première fois depuis longtemps, le soutien de plusieurs intellectuels de renom. Figure de proue de cet engagement, le sociologue Pierre Bourdieu, qui s'en va haranguer les cheminots à la gare de Lyon pour clamer son refus de «la nouvelle alternative: libéralisme ou barbarie». «Ce conflit a été cardinal. Non seulement parce qu'il a permis de restructurer tout le champ de la gauche, mais surtout parce qu'il a apporté la démonstration du bien-fondé de la révolte», explique Daniel Bensaïd, membre du bureau politique de la LCR et maître de conférences de philosophie.
«Désobéissance civique». C'est le début d'une farandole des pétitions qui donne une véritable bouffée d'oxygène à cette frange de l'échiquier politique jusque-là marginalisée, écrasée par le poids des idées en vogue et surtout privée d'un porte-parole. Peu avare de sa signature, le sociologue le plus connu de France est de tous les comités de soutien. En novembre 1996, il préside des «états généraux du mouvement social», avec des syndicalistes et les militants de ce fameux mouvement social: associations de ch