Big bang chez les intellos. Y aura-t-il, dans le débat intellectuel
français, un après-Kosovo comme il y a eu un après-Maastricht ou un après-décembre 1995? Lorsque, au milieu des années 90, un Alain Finkielkraut ou un Bernard-Henri Lévy réclamaient une intervention des puissances occidentales en Bosnie, ils prêchaient peut-être dans le désert. Mais au moins ne s'invectivaient-ils pas par tribunes interposées avec d'autres penseurs français. Avec le Kosovo et les vigoureuses polémiques qui se sont ensuivies, la question yougoslave change de nature. De nouvelles lignes de fractures apparaissent, le ton monte facilement. Des accusations de «négationnisme» sont lancées de part et d'autre et, récemment, Bernard-Henri Lévy comparait Jean-Pierre Chevènement à Jean-Marie Le Pen. A ce train-là, l'affaire pourrait bien finir par faire exploser les lignes de force qui, depuis quelques années, structuraient le paysage intellectuel hexagonal.
Syndrome munichois. A priori, l'affaire était pliée. Pour la nébuleuse gauche «morale», «droit-de-l'hommiste», la défense des frappes, l'appel à l'ingérence, la lutte contre le syndrome munichois. Ainsi, successivement, le cinéaste Romain Goupil, les animateurs de la revue Esprit, Jean-Marc Salmon, sociologue et organisateur de la campagne de Daniel Cohn-Bendit, Bernard-Henri Lévy, l'écrivain Pascal Bruckner et bien d'autres ont pris la plume pour défendre les frappes de l'Otan. Dès le premier jour, BHL lançait dans Libération: «Je ne comprends pas l