Dans quelle mesure les services du Premier ministre étaient-ils au
courant des agissements de Bernard Bonnet? A Matignon, trois personnes suivaient le dossier corse. Olivier Schrameck, directeur de cabinet de Lionel Jospin, dirigeait tous les quinze jours une réunion des directeurs de cabinet des ministres concernés (Intérieur, Justice, Economie, Agriculture"); Alain Christnacht, conseiller chargé des affaires de sécurité, qui se consacre plus spécialement au problème calédonien; et Clotilde Valter, une jeune énarque que Jospin avait recruté à l'Education nationale, et qui s'occupe de tout ce qui a trait à la police, avec rang de conseillère technique, c'est-à-dire avec une très faible de marge de manoeuvre politique.
Coups de fil et cahiers. En quatorze mois, Bonnet vient une trentaine de fois au ministère de l'Intérieur et une dizaine de fois seulement à Matignon. L'information circule surtout par des échanges téléphoniques très réguliers entre lui et les deux conseillers, et plus particulièrement avec Clotilde Valter, en raison des déplacements répétés de Christnacht outre-mer. Ces coups de fils sont consignés par écrit dans des cahiers, comme le font tous les conseillers ministériels. Le dispositif est facilité par les affinités de personnes: Clotilde Valter est amie avec Philippe Barret, en charge de la Corse au cabinet du ministre de l'Intérieur, Jean-Pierre Chevènement. Lequel Barret partage avec Bonnet sa flamme républicaine et sa méfiance envers la police. Et Valter s