La couture au bas du ventre tient du vague essai chirurgical. Tout le reste est prophétie: les sourcils dessinés façon Marlène Dietrich, les traces d'un rouge baiser qui déborde, deux ronds de carton jauni retenus par une épingle sur la poitrine" seins coniques ante-Madonna. Le cheveu ficelle a connu la teinture gris marquise de la grand-mère, puis le roux, puis le noir, il n'est plus que paille. Ci-gît le nounours sans peluche de Jean-Paul Gaultier: «Nana», qui portait le voile le jour où la télé maria Fabiola et Baudouin de Belgique, et un napperon troué en guise de jupe les jours sans fastes. Vieux compagnon de rêve, premier modèle, qui finit façon drag-queen fatiguée. «Un monstre», sourit Gaultier. Qui dort tout de même dans une boîte à chaussures, enveloppé de papier de soie, dans les placards de l'atelier. Résidu d'enfance préservé derrière les portants lourds de vêtements, prêts pour le prochain défilé.
Jean-Paul Gaultier aime les marches arrière. Il exécute le «tout petit déjà» sans qu'il soit besoin de rien lui demander. C'est la seule clé qu'il puisse offrir. Sa cohérence. Il peut tenter d'expliquer Coco Chanel comme une fille d'origine modeste, qui habilla les femmes chic en robe noire et col blanc telles des bonnes. «Comme pour une espèce de vendetta», dit-il. De lui, il ne peut donner que ce qu'il a puisé dans son imagier de gamin. Jean-Paul Gaultier, petit banlieusard d'Arcueil, fils de comptables, collectionnait les Petit Echo de la mode de sa mère, comme d'aut