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Marxisme balnéaire

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Les bords de mer hébergent une sourde lutte des classes: riches , étrangers ou exclus... les vacanciers restent entre eux pour préserver la paix sociale.
publié le 20 juillet 1999 à 23h58

«Vous vous intéressez à l'humanité? Installez-vous de longs après-midi sur une plage, trempez les pieds dans l'eau et ouvrez les yeux" Sous le prétexte innocent des plaisirs balnéaires, chaque station du bord de mer héberge une sourde et permanente lutte des classes, un conflit social inépuisable, un feuilleton marxiste en perpétuel renouvellement (1).»

Qui a observé la plage autour de lui un jour d'été (aujourd'hui, par exemple) sait qu'elle n'a rien d'un endroit sauvage, c'est même un concentré de civilisation. Un lieu hautement social où l'on se conduit comme d'habitude. En plus marqué. «Officiellement, la plage c'est l'image de la liberté, de la tolérance absolue. En même temps, il y a des règles, un langage secret qui régit son fonctionnement, remarque le sociologue Jean-Claude Kaufmann. Ça entraîne une ségrégation sociale qui ne dit pas son nom.» Entrez dans un cinéma, montez dans le métro parisien, allez à McDo ou à Eurodisney: voilà des endroits qui mêlent démocratiquement toutes les classes sociales. Pas les plages. Ce sont des lieux totalement ségrégationnistes: un habitué de Palavas-les-Flots ne mettra jamais les pieds à Trébeurden ou à Cavalaire.

Les nudistes et les «textiles»

Il y a les plages nudistes et les «textiles», les «familles» et les homosexuelles. Et, surtout, les populaires et les plus chic, parfois à quelques dizaines de mètres de distance. Passez de Cabourg à Villers en Normandie ou de la plage des Corbières à celle des Catalans à Marseille: vous comprendrez que l'on ne fait pas pl