Une institution a-t-elle le devoir de protéger une oeuvre d'art qu'elle a commandée? Un artiste nommé Laurent Joubert a la faiblesse de le penser: il attaque en justice un institut d'enseignement artistique auquel il reproche d'avoir détruit une de ses oeuvres. Ce plasticien et enseignant aux Beaux-Arts de Marseille avait été invité en janvier 1998 par l'Institut régional d'art visuel de Martinique (IRAVM) à animer un atelier à l'occasion du 150e anniversaire de l'abolition de l'esclavage. Il a réalisé, avec la collaboration des étudiants des Beaux-Arts de Nîmes, Marseille et Fort-de-France, deux maquettes de sculpture monumentale: deux chariots, de plusieurs mètres de haut et de long, en carton rigidifié à la résine époxy. Le premier, constitué de deux cylindres, se veut «une représentation de la paix». Le second, «une allégorie de l'esclavage».
Droit moral. Quelques mois après son retour en métropole, il entend dire par un enseignant de l'Institut que l'oeuvre a été détruite. Pour Me Jean-Paul Lévy, son avocat, qui demande un million de francs de dommages et intérêts, «cette destruction constitue une voie de fait. Elle porte indéniablement atteinte à son droit moral». Il s'appuie sur une jurisprudence bien établie qui protège le droit moral de l'artiste sur son oeuvre, et qui étend ce droit aux maquettes.
Jean-Hubert Martin, directeur du Musée des arts d'Afrique et d'Océanie, projetait de faire exposer les deux sculptures qui ont retenu son attention lors