Elles ont pris l'habitude de déjeuner entre elles. Les dames du
gouvernement s'invitent les unes chez les autres. Papotent et complotent dans leurs salons ministériels. Il est manifestement un sujet qui les agite et les fait se serrer les coudes: toutes ou presque seront candidates aux municipales de 2001 et voudraient, en cas de victoire, pouvoir rester dans leurs ministères jusqu'aux élections législatives de 2002. La jurisprudence Jospin l'interdit. Dès son arrivée à Matignon en juin 1997, le Premier ministre avait demandé à ses ministres de quitter leur fonction de maire, de n'être plus que des adjoints dans leur ville. Bon gré mal gré, ils s'étaient exécutés, laissant plus ou moins d'air à leur successeur.
En 2001, si la gauche est en forme, Martine Aubry pourrait être élue à Lille, Elisabeth Guigou en Avignon, Dominique Voynet à Dole, Catherine Trautmann à Strasbourg, Marie-George Buffet dans un bastion communiste de Seine Saint-Denis et Marilyse Lebranchu à Morlaix. Aucune ne se voit lâcher une ville à peine conquise, surtout à un an des législatives. Toutes seraient donc amenées à quitter le gouvernement. Aussi, les femmes demandent-elles comme un codicille à la loi Jospin. Un arrangement pour cause de calendrier électoral mal fichu. Voynet sans détour. Martine Aubry n'a qu'un mot à la bouche: Lille. Dominique Voynet, elle, ne prend même plus la peine de chuchoter. Pourtant issue d'un mouvement viscéralement anticumul, elle parle sans complexe, n'a pas l'intention