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TRIBUNE

Dessine-moi un procureur

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Le Parlement ne doit pas refuser de voter la nécessaire réforme constitutionnelle, mais améliorer les textes sur l’action publique et la présomption d’innocence.
par Mireille Delmas-Marty, professeur à Paris-I et membre de l'Institut universitaire de France.
publié le 3 janvier 2000 à 22h11

Son nom varie: procureur, ministère public, parquet. Chaque terme décrit l’un des visages et rappelle un moment de l’histoire de ce personnage insaisissable qui fait partie du corps judiciaire sans être pour autant un juge.

Il faudrait d'abord dessiner un grand corps, celui des magistrats. Un corps hétérogène car on y trouve précisément des juges et des procureurs. Dans tous les procès, c'est au seul juge qu'il appartient de juger en arbitrant entre le demandeur et le défendeur. Mais quand il s'agit d'appliquer une peine au nom de la société (procès pénal), le demandeur est la société tout entière. C'est pourquoi la France, comme les autres pays d'Europe continentale, a renoncé au système d'accusation privée, considérant que la société serait mieux protégée et les intérêts de la défense mieux sauvegardés si le demandeur principal était un procureur.

Ce ministère public, il est préférable qu'il fasse partie du corps judiciaire afin d'assurer un meilleur contrôle du respect par la police de la liberté individuelle. Le Conseil constitutionnel l'a d'ailleurs rappelé en 1993, à propos du contrôle de la garde à vue: «L'autorité judiciaire qui, en vertu de l'article 66 de la Constitution assure le respect de la liberté individuelle, comprend à la fois les magistrats du siège et ceux du parquet.» La grande faiblesse des systèmes qui séparent totalement le ministère public des juges, c'est que la police reste largement autonome et difficilement contrôlable. Les Anglais en font l'expéri