Michel Rocard n'aime pas parler de «cagnotte». Son usage devrait, selon l'ancien Premier ministre, être affecté à une baisse de la dette et des impôts locaux. Interview.
Quand vous étiez à Matignon, vous aviez vous aussi bénéficié d'une reprise économique. Regrettez-vous de ne pas avoir su l'utiliser?
Ce n'est pas exact. En 1987, nous avions 4% de croissance. Quand je suis nommé Premier ministre en 1988, c'est 3,8%. Ce qui est très bon. Mais mes trois années de mandat vont être consacrées à la gestion du déclin relatif de cette croissance qui va atterrir à 2,5% en 1991. Aujourd'hui, la croissance est à la hausse. Ce que j'ai fait, c'est affecter un petit tiers de cette croissance à la baisse des impôts et à la réduction du déficit budgétaire, et deux gros tiers à l'Education nationale. C'est un choix dont la France entière devrait me remercier. Je n'ai aucun regret sur l'usage que j'ai fait des plus-values fiscales fournies par cette croissance.
A votre avis, que doit faire le gouvernement aujourd'hui de sa «cagnotte»?
Il faudrait se débarrasser de ce mot dangereux de «cagnotte». Je préfère parler de «surplus»" C'est Christian Sautter lui-même qui a parlé de «cagnotte»" L'agitation autour de ce surplus conduit à une dramatisation. Du coup, on ne peut plus travailler. Tout le monde s'emballe trop vite. Certes, le mot «cagnotte» est compris de tous, mais ce n'est pas une raison pour en majorer l'importance.
Alors, quel emploi en faire?
La bonne façon de traiter ce petit mieux, c'est sûrement de ne pas se laisser aller à l'émotion. Le meilleur usage de l'argent public, c'est celui qui est le plus productif à long terme. Après calcul, il n'est pas impossible que ce soit l'abaissement du niveau de la dette de l'Eta