Paru en dernière page de «Libération» du 27 septembre 2000.
«Vous allez voir ! Il est vraiment minuscule !» Quand ils vous parlent d’Alain Minc, c’est presque toujours la première chose qu’ils disent, éditeurs, journalistes, hommes d’affaires : comme si la manipulation sans pitié d’influences et d’idées ne pouvait être menée que par un basketteur. Mais, lorsqu’il vous fixe, la taille disparaît. D’abord, parce qu’il a enfin vieilli : son visage n’est plus celui d’un bibelot de concours entré à Louis-le-Grand, sorti major de l’ENA, promotion Léon-Blum (celle de Martine Aubry, une «amie»), puis propulsé génie moderne lorsque, à 28 ans, il publia le rapport sur l’informatisation de la France. Ensuite parce que, sous le sourire d’enfant mobile, un regard animal rappelle vite que ce «banquier d’affaires à l’ancienne» (comme il dit) n’est pas là, dans son bureau de l’avenue George-V, par hasard. Président solitaire d’AM conseil, président de la Société des lecteurs du Monde, administrateur ici et là, conseiller au forfait d’une quinzaine de prédateurs d’affaires (avec pourcentage sur les «coups» réussis), ascétique proustien de la mondanité et auteur de best plus ou moins sellers : pour obtenir ça, il a fallu du talent, l’instinct du joueur, de la méchanceté, du mépris, de la fidélité et, avant tout, un pessimisme désespérant.
A côté de son bureau, quelques photos sont posées en rang : mise en cadres de sa réussite par lui-même. La chartreuse acheté