L'armée française a torturé durant la guerre d'Algérie, nul n'en doute. Voici un témoignage connu depuis vingt ans et qui sera de nouveau disponible en librairie, lundi (1): «L'homme attaché, nous fixons un fil électrique au lobe de l'oreille gauche, le deuxième étant placé sur le gland de la verge. A la première secousse, le suspect hurle longuement. Son corps se cabre. Il pleure. "Tu vois bien qu'il faut parler."» Ce récit est celui d'un ancien des DOP les «détachements opérationnels de protection» , ces unités chargées d'interroger les prisonniers et, à ce titre, de les torturer.
Indifférence. Cet ex-sous-officier a souhaité rester anonyme, et c'est à cette seule condition que son témoignage a pu être recueilli et publié par le journaliste Jean-Pierre Vittori. Le livre On a torturé en Algérie, qui s'appelait alors Confessions d'un professionnel de la torture, a paru en 1980 dans une indifférence quasi totale. Il a parfois suscité l'incompréhension; des lecteurs trop rapides croyant qu'il s'agissait du témoignage personnel de Jean-Pierre Vittori, alors journaliste communiste et rédacteur en chef de Patriote-résistant, le mensuel des anciens déportés...
En 1977, Jean-Pierre Vittori avait publié un premier ouvrage sur le sujet: Nous, les appelés d'Algérie (Stock). «J'ai alors reçu la lettre d'un type du sud de la France, qui me disait qu'il avait passé cinq ans dans les DOP, explique-t-il. J'étais partagé entre le rejet de celui que je considérais comme un salaud et l'envie