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«Par la douleur programmée, ascendante, nous obtenons les meilleurs résultats»

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publié le 2 décembre 2000 à 7h25

Nous publions quelques extraits du livre de Jean-Pierre Vittori On a torturé en Algérie, à paraître lundi aux Editions Ramsay.

La gégène. «Dans le domaine de la torture, les hommes font preuve d'une imagination parfois débordante. Deux mois après notre arrivée, nous sommes loin de la méthode du passage à tabac. On innove, on perfectionne l'art, on met au point des progressions aussi bien dans les questions que dans la douleur. Premier cap, la "gégène", la fameuse génératrice à manivelle. Tout l'art consiste à bien la manipuler. Par la douleur programmée, ascendante, nous obtenons les meilleurs résultats. Ainsi nous épargnons à l'homme d'autres formes de supplices comme l'absorption d'eau: sept à dix litres introduits dans l'estomac à l'aide d'un entonnoir. La combinaison des deux donne un interrogatoire "très poussé".»

Les hommes. «Je crie: "Introduisez le suspect." Il entre soutenu par deux gardes. Ses pieds chaussés de babouches traînent lamentablement sur le sol, son visage porte de nombreuses traces de coup, le sang coule de son nez et des arcades sourcilières éclatées... D'une bourrade, je l'assois sur une chaise libre et je saisis un nerf de boeuf pendu derrière la porte.»

Les femmes. «"Je suis innocente. ­ Embarquez-la!" Nous l'escortons jusqu'à la cave. [...] Attachée sur le lit, jambes écartées, elle pleure sans retenue, les larmes se perdant dans sa longue chevelure noire. On introduit un fil (électrique) dans le vagin, l'autre fil entoure l'oreille. La séance commenc