Souvent, les anciens moudjahidin d'Algérie installés en France se sont tus. Loin de leur terre natale, ils ont enfoui leurs souvenirs et leurs blessures dans le silence. Difficile de partager cette histoire ici, en France, avec d'anciens ennemis vaincus qui plus est ou de la transmettre à leurs enfants, français pour la plupart. Beaucoup d'Algériens ont ainsi verrouillé leurs récits, renvoyant la deuxième génération aux livres d'histoire.
Chez les Guessas, la guerre d'Algérie n'est pas taboue. Ni encombrante. «Pour mes enfants, j'ai voulu éviter toute vengeance. Que ces années de guerre ne recommencent pas», souffle Dahmane, le père de famille, adhérent à l'association pour la promotion de la culture algérienne, à Givors, une émanation d'une ancienne amicale FLN.
Dahmane Guessas a vécu les «événements» d'abord adolescent, puis jeune homme, dans les environs de Sétif. Témoin direct des violences et des exactions, il a été aspiré par la guerre: «Quand il y avait des rafles, on se faisait embarquer. On était tous parqués dans le stade des jours entiers. Des types dégringolaient des estrades, se faisaient massacrer. Certains n'en revenaient pas.» Comme son oncle et plusieurs des siens. «L'épisode du stade, non, il ne nous l'a pas raconté. Les disparitions de membres de la famille, ça oui», raconte son fils de 29 ans, Rabah. «La torture, ce n'était pas que les massacres, ajoute le père, Ma maison était à côté de l'école, je voyais passer les petits Français qui allaient en cour