Fils de pied-noir, né en 1955 en Algérie, Jean-Jacques Jordi est historien, spécialiste de la Méditerranée et des rapatriements. Il est l'auteur, avec Mohand Hamoumou, des Harkis, une mémoire enfouie (Autrement, février 1999).
Cette plainte vous paraît-elle un bon moyen pour les harkis de se faire reconnaître comme victimes?
Sans préjuger du caractère juridique, il m'apparaît légitime que des harkis et non pas la «communauté harki», qui est une nébuleuse qui se sont sentis bafoués, torturés, rejetés attirent l'attention de ceux qui devaient les défendre les premiers, ceux pour qui ils avaient pris les armes. La France a abandonné à un sort qu'elle connaissait toute une population qui avait servi pour elle. La plainte peut donc permettre d'attirer l'attention des Français sur un épisode qu'ils ne connaissent pas.
Comment se sont passés les massacres?
Il y a eu une gradation. De mars 1962 à mai, des vexations, des brimades, des rejets. En juin, les premières arrestations et liquidations. Puis, en juillet-août, les massacres commencent, avec tout le raffinement que permet l'horreur: gens dépecés, énucléés. On leur faisait avaler des médailles militaires françaises, on les brûlait vivants à la chaux, sans parler des massacres d'enfants, des viols, des têtes coupées, des hommes émasculés, des corps brûlés...
Quels en furent les auteurs?
Beaucoup sont le fait des «marsiens», les Algériens attentistes qui ont compris, à partir de mars 1962, que le FLN avait gagné et qui devaient montrer qu'ils étaient dignes d'être algériens. Dans ces conditions, la plainte actuelle doit aussi se porter vers l'Algérie, puisque, après le 3 juillet 1962, la Franc