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Libération

Une nouvelle ère de l'humanité

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Septembre 2001. 4 - Ce monde qui a changé. L'«hyperguerre» quotidienne.
par Yann Moix
publié le 21 septembre 2001 à 0h54

Ca y est : le monde ne sera plus jamais en guerre, mais il sera désormais guerre tout court. A compter du 11 septembre 2001, tout sera guerre, même la paix. La paix ne sera plus le contraire de la guerre, elle en sera son contexte, son milieu naturel, son écosystème, son décor, son fond d'écran, son background. Guerre et paix ne seront plus le contraire l'une de l'autre (c'était bon du temps manichéen des blocs Est-Ouest), mais seront imbriquées l'une dans l'autre, comme les deux faces connexes d'une même réalité.

La paix sera une sorte de cas particulier de guerre. La guerre se fera dans une poubelle gare de l'Est, et au-dessus de nos têtes dans les airs. Elle sera permanente. Ouverte 24 heu res sur 24, comme CNN. Elle sera faite de pauses, mais ne connaîtra pas de répit. Ce sera une guerre aveugle, mais précise. Floue, mais ciblée. Car jamais la distorsion n'a été si grande entre le flou des cau ses et la précision des coups.

La première hyperguerre mondiale a commencé. Guerre où tous les prétextes sont bons et où les actes servent a posteriori de déclaration. Une hyperguerre, un monde dans lequel le contexte normal, naturel, des sociétés n'est plus la paix, mais la guerre. Une hyperguerre, ce n'est pas une guerre comme les guerres mondiales, avec des camps qui s'opposent; c'est une guerre non euclidienne, non répertoriée, sans règles et sans autres principes que sa propre logique. L'hyperguerre n'est pas localisable dans l'espace ni dans le temps. Elle est une sorte de chef