Elle se présente : «Claire, première année de classe préparatoire commerciale.» Une dizaine de voix chuchotées psalmodient crescendo. «Bizute... BIZUTE...» Puis decrescendo, «bizute...». Elle ne relève pas. L'an prochain, elle fera peut-être subir le même sort aux nouveaux. Bienvenue au lycée Louis-le-Grand, Paris, terre de tradition de l'excellence républicaine avec ses rites fondateurs déjà d'un véritable esprit de corps. Et ses taux de réussite faramineux au bac et aux concours des grandes écoles. Une des fabriques d'élite les plus recherchées du pays. Un professeur de mathématiques a joué les entremetteurs afin de réunir une vingtaine d'élèves de classe prépa scientifique et commerciale. Ils ont entre 18 et 20 ans. «Ils sont très forts, précise-t-il. Plusieurs futurs polytechniciens dans le lot.»
«C'est un discours de droite !» Sans surprise, cette jeunesse vive, cultivée, intelligente, a beaucoup à redire sur la présidentielle. La moitié d'entre eux vote pour la première fois, l'autre s'est déjà prononcée lors des municipales de l'an passé. Sentiment civique bien développé. Exigence aussi. Claire, donc : «C'est insuffisant. Tout se joue sur l'image. Vous avez vu Le Pen avec un gamin noir dans les bras ?» Julien, lui, en veut «aux gens qui sont sensibles» à ces images. Ils cherchent les idées, les programmes. Adrien : «Il y a bien des sujets qui pourraient nous toucher, mais les candidats mettent l'accent sur des thèmes fédérateurs, comme l'insécurité.» Brouhaha d'où