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Libération

«Une odeur d'oignon et de thon»

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Pour le Tunisien Ben Brik, la campagne n'est pas drôle.
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publié le 27 mars 2002 à 22h43

«Je ris quand j'entends dire que le poisson dans l'eau a soif.» Ainsi chantait un clodo. A ce poète de circonstance, la présidentielle française inspire des airs de blues. Les Tunisiens ont l'habitude de vivre les élections françaises par procuration, avec plus d'appétit que les Français sans doute, comme on suit les olympiades. On attendait des sprinteuses noires, des haltérophiles rus ses, des monstres et voilà qu'apparaissent deux Saoudiens en grande robe qui paradent pour l'honneur, pas pour la compétition. Cette année, ça nous emmerde. On annonce un débat. On n'entend que des monologues. L'un des deux, Jospin je crois, a parlé de la vieillesse de l'autre. On a cru qu'on allait enfin s'amuser. Eh bien, non. Il s'est repenti.

Barboter, chier, caqueter. La présidentielle 2002... n'emballe personne et ne s'emballe pas. Elle ne déconne pas. Elle ne rigole pas. Elle ne swingue pas ! Trop guindée, «cravatée», soucieuse du qu'en-dira-t-on, «classe moyenne»... L'irrespect, l'impertinence, la caricature et la satire sont englués dans l'esprit de sérieux. Le crayon de Willem, de Cabu ou de Plantu n'a pas engendré un cheval fou, un chien pensif ou une tête de vache qui rit de toutes ses dents.

Nous sommes loin des temps où on pouvait se moquer de ce qui est beau et parfumé et de ce qui sale et puant. D'un rire de Woody Woodpecker. Un rire qui éclabousse ami, ennemi et soi-même ! Rappelez-vous, y'a pas longtemps, on riait pour conjurer le ridicule. On riait pour fragmenter la vérité.