Le 30 octobre 2000, des maires d'arrondissements parisiens (Ve, XIe, XIIe et XIIIe) interdisent soudainement la viande de boeuf dans les cantines scolaires. Le 26 novembre 2001, le ministre des Transports, Jean-Claude Gayssot, annonce, à la surprise générale, que le tunnel du Mont-blanc ne sera rouvert aux camions qu'à sens unique et «pas avant le début de l'année 2002». Ces deux décisions ont été prises sous le coup de l'émotion, sans expertise préalable. Elles montrent, chacune à sa manière, qu'il arrive que les peurs nous gouvernent, comme le proclame le titre d'un ouvrage récent de Martin Hirsch, directeur de l'Afssa, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (1).
Scénario. Jean-Claude Gayssot a pris sa décision au lendemain d'une collision entre deux poids lourds dans le tunnel suisse du Gothard. L'accident a fait 11 morts. Deux ans et demi après les 39 morts du Mont-Blanc, cette tragédie remettait brutalement en cause le scénario de réouverture imaginé par les pouvoirs publics. Des dizaines de réunions publiques avaient préparé l'opinion à une reprise du trafic dans les meilleures conditions de sécurité possibles. L'hypothèse de circulation alternée n'avait jamais été envisagée. Mais ce 26 novembre, Jean-Claude Gayssot devait faire la démonstration spectaculaire de sa volonté de réduire les risques. Dans un registre moins dramatique, la décision de retirer la viande de boeuf des cantines était du même ordre. Les maires parisiens réagissaient