Résumé de l'épisode précédent : un projet indigeste, des «déplacements thématiques» soporifiques, une équipe divisée et un candidat tout en retenue : en mars, la campagne de Jospin a viré à la corvée. Le spectre de la défaite plane sur l'Atelier et la menace lepéniste se précise. Mais nul n'imagine le «coup de tonnerre» du 21 avril.
Que sait-on, somme toute, de ce que fut cette campagne ratée pour son principal acteur ? Six semaines durant, du vol Saint-Denis de la Réunion-Paris à l'annonce des résultats du premier tour, Lionel Jospin est apparu singulièrement absent à son équipe, à son entourage, à ses amis. Consciencieux, d'humeur égale, toujours prêt à se laisser transporter, n'engueulant plus personne, certes... Mais, surtout, absent. A tous, il répète : «Ce premier tour est une épreuve physique.» «Quand je l'appelais, parfois, je sentais qu'il n'était pas heureux», confie le maire de Paris, Bertrand Delanoë. «Je l'avais deux fois par semaine au téléphone, il était absolument charmant, mais il ne prenait pas vraiment le temps de parler», complète Claude Allègre. Tellement absent de sa campagne que son agenda, c'est son secrétariat de Matignon qui le tient...
«Coupé en deux». Au fond, la vie du candidat Jospin a été un enfer. Lorsque Marie-France Lavarini, son attachée de presse, passe le prendre, le matin, il a déjà des monceaux de textes à relire : interviews, réponses écrites, discours, documents de campagne. Dans les trains, les avions, les voitures, il lit, annote, cor