Un grand craquement, comme un verrou qui saute : les WC, toilettes, chiottes, longtemps lieu du recueillement ou de la volupté en solo, s'ouvrent à la modernité. Le choc est brutal : le grand dehors importe dans ce réduit symbolique son fatras indigeste. L'esthétique, avec le design ; sa vulgarité industrielle et économique ; le marketing avec les discours sur l'évasion, le bien-être ; la conso ostentatoire avec les gadgets clinquants. Et les grandes préoccupations du temps : l'environnement avec l'économie de l'eau ou la communication. Violente mutation de société ? Plus que l'on ne l'imagine.
«Courbes sensuelles». Tout surgit d'un séisme : la conquête par le WC d'une place centrale dans l'espace domestique. Il est devenu une pièce à part entière, à des années-lumière du trou improvisé ou de la cabane sordide. Il n'est pourtant pas si loin le temps où le docteur Napias, figure de la tendance hygiéniste de la fin du XIXe, proposait une mesure qu'il qualifiait lui-même de «radicale et révolutionnaire» : l'obligation d'un WC par logement. C'était en 1883 et ce fut le début d'une guerre sans merci. Au bout de cent vingt ans, Napias l'a emporté : 97 % des logements comportent des WC, indique l'Insee.
Avec, au centre, bien sûr, une cuvette. La cuvette ? «L'un des plus beaux objets que l'industrie ait fabriqués. Là se révèlent toutes les courbes sensuelles de la divine face humaine», affirmait Le Corbusier (1), sans doute sous acide, tant l'objet fut méprisé. Aujour