Dominique Strauss-Kahn fricote du côté de Policy Network, l'une des boîtes à idées du blairisme anglais, Laurent Fabius s'applique, selon l'un de ses proches, à rencontrer «les plus grands», Martine Aubry entretient son propre cercle d'intellectuels, et Henri Emmanuelli tente de bâtir le sien : en mal d'identité, les socialistes se sont mis en quête de matière grise. Chargé de la conduite des affaires pendant quinze des vingt et une dernières années, ils se sont concentrés depuis 1981 sur l'art et la manière de conquérir le pouvoir et les savants équilibres à ménager pour s'y maintenir. Ils ont appris à gérer, conquis la durée et acquis la légitimité d'un parti de gouvernement que plus personne ne leur conteste. Mais ils ont aussi désappris à réfléchir. «Le PS ne sait plus penser les choses, les mutations de la société, l'évolution du monde, indépendamment d'une finalité purement électorale. Il n'a plus la capacité de construire un projet qui aille au-delà des prochaines échéances», reconnaît le député de la Nièvre Gaëtan Gorce, chargé du secteur études à la direction du parti. Depuis que la frêle et inachevée théorisation du jospinisme a volé en éclats au soir du 21 avril, il y a urgence. Après s'être ralliés honteusement à l'économie de marché, adaptés tant bien que mal aux réalités du pouvoir et convertis au pragmatisme, les socialistes sont aujourd'hui condamnés à remettre à jour leur grille idéologique.
Un parti asséché
Mais pour se convaincre de la nécessité de cet effor