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Libération
Interview

«Chevènement, pas assez démagogue».

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publié le 27 janvier 2003 à 21h59

Philosophe, essayiste, Pierre-André Taguieff explique les raisons des échecs successifs de Jean-Pierre Chevènement.

Après le MDC en 1993, le Pôle républicain en 2002, voilà le Mouvement républicain et citoyen. Depuis dix ans, Chevènement butte sur la création d'un courant souverainiste. Pourquoi ?

Il y a un irrémédiable décalage entre une analyse critique forte de la société individualiste et marchande et la définition d'un projet politique crédible autant qu'attractif. Les arguments critiques avancés par des intellectuels ou des associations, qu'il s'agisse d'une dénonciation de la mondialisation telle qu'elle se fait (néolibérale sauvage) ou d'une mise en évidence des dangers d'une fragmentation ethno-religieuse, semblent ne pouvoir se traduire dans la langue politique concrète. Il est difficile de transformer un ensemble de postures politiques en un parti à la fois idéologiquement différencié et attrape-tout (par ses ambiguïtés calculées) comme le jeu de la compétition électorale l'impose. Par ail leurs, paradoxe facilement observable, la thématique souverainiste explicite ne rallie qu'une minorité de citoyens, alors que l'attachement à la souveraineté populaire et nationale est une vertu politique fort bien distribuée. Mais elle l'est tout autant à droite qu'à gauche, autant à l'extrême droite qu'à l'extrême gauche. Il y a plusieurs souverainismes non thématisés. C'est l'obstacle sur lequel butte Chevènement depuis dix ans.

Il prétend se situer «au-dessus des partis». Visib