Pour la droite aujourd'hui, «l'idéologie» est un gros mot. Une grossièreté qu'elle ne se lasse pourtant pas de manier, Jean-Pierre Raffarin en tête : «Nous ne sommes pas le gouvernement je-sais-tout, qui applique une idéologie. Nous sommes des pragmatiques. Nous tenons compte des réalités. Je connais le terrain, j'écoute le terrain», lançait le Premier ministre, en novembre, lors d'un déplacement à Besançon. En début d'année, il affirmait que la «nouvelle gouvernance» qu'il prône consiste à «plus de sagesse et moins d'idéologie». Manière de pointer en creux le sectarisme supposé de ses contradicteurs.
«Intérêt général.» L'antimodèle absolu est Lionel Jospin, coupable d'avoir affiché des «identifiants» de gauche comme les 35 heures ou la loi de modernisation sociale. Au diapason de Jacques Chirac qui a promis aux Français pour son quinquennat trois chantiers prioritaires «qui ne sont pas de pierre» (sécurité routière, lutte contre le cancer, insertion des handicapés), le chef du gouvernement se pose en champion de la dépolitisation du débat public. Le couple exécutif en a fait son véritable dogme. Objectif : accréditer l'idée selon laquelle le gouvernement est mû par la seule recherche de l'unanimité et de «l'intérêt général».
Mâtiné d'une forte communication, ce type de message offre l'avantage de laisser peu de prises à l'opposition. «La posture antipolitique est en réalité une forme d'idéologie à droite qui n'est pas nouvelle, affirme l'historien Alain Bergounioux, secrétair