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Libération
Interview

«L'Etat participe au communautarisme»

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La sociologue Dominique Schnapper analyse les dérives particularistes :
publié le 7 mai 2003 à 22h54

Comment le communautarisme ­ si contraire à la tradition française ­ a-t-il pu progresser ? Interview de Dominique Schnapper, directrice d'étu des à l'Ecole des hautes études en sciences sociales et auteure de la Démocratie providentielle (1).

La montée des communautarismes vous semble-t-elle réelle ?

Ça dépend du sens qu'on donne à ce mot. S'il s'agit du rapprochement de gens ayant des goûts, des affiliations proches, cela est normal. En revanche, cela commence à poser problème lorsque, au-delà de ces rapprochements, la conscience particulière prend le dessus sur la conscience collective, c'est-à-dire, quand on devient exclusivement juif, chrétien ou musulman et qu'on refuse les échanges avec les autres groupes de la société.

Est-ce le cas aujourd'hui ?

Pour l'instant non. Mais il y a des risques de dérive et il faut veiller à ce qu'il n'y ait pas, à l'intérieur d'une même société, des groupes qui s'enferment dans leur propre particularisme.

Comment en est-on arrivé là ?

C'est incontestablement le résultat d'un affaiblissement des valeurs républicaines, ces valeurs communes qui permettent à la population de vivre ensemble.La logique de l'Etat-providence a fait le reste. Au nom de l'égalité réelle de tous ses membres, l'Etat-providence est intervenu dans tous les domaines de la vie sociale, y compris ethnique, pour lutter contre les discriminations dont certaines populations font l'objet au nom de telle ou telle pratique culturelle. Et l'Etat participe indirectement à la montée des communautarismes quand, par exemple, il forge des politiques de la ville pour certaines populations ; quand il p