Auteure des Inégalités sociales à l'école (1) Marie Duru-Bellat, sociologue et professeure à l'université de Bourgogne explique d'où vient l'absence de confiance des enseignants grévistes à l'égard du gouvernement.
Les enseignants ont adopté des formes de conflits, pour certains jamais vus dans l'éducation depuis 50 ans, comme le boycott des examens. Qu'est-ce qui explique une telle radicalité ?
On peut les comprendre d'abord par l'accumulation des maladresses du gouvernement depuis son arrivée. Mais ce qui est le plus évident, c'est le changement profond de l'attitude du pouvoir politique à l'égard des enseignants. Depuis 1981, ces derniers étaient habitués à avoir l'écoute attentive du personnel politique, ne serait-ce que grâce à la présence, à l'Assemblée, de nombreux députés issus de l'enseignement. Avec l'arrivée de la droite, ils se sentent abandonnés. L'Intérieur est devenu la priorité. Ils ne sont plus les premiers de la classe. Et pour des profs, c'est difficile à avaler.
Il ne s'agit donc pas d'un rejet de leur métier.
Non. Absolument pas. Ils aiment leur métier. Dans l'ouvrage de Christian Baudelot (2), lorsqu'on pose la question : «Voulez-vous que vos enfants fassent le même métier que vous ?», ce sont les enseignants qui répondent le plus massivement oui. On peut d'ailleurs remarquer qu'ils sont aussi les premiers à adopter des stratégies scolaires pour leurs enfants afin qu'ils puissent atteindre ce but.
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