Ajaccio, Corte, envoyés spéciaux
Pas de témoin direct, mais déjà une foule de commentaires dans les rues d'Ajaccio. La profanation de la stèle commémorant l'assassinat du préfet Claude Erignac le 6 février 1998, est au centre de toutes les conversations. De cette plaque de marbre noir, qui était apposée sur un mur de la rue d'Ornano, il ne reste plus que quatre chevilles orange et un rectangle plus clair sur le mur. A un mètre de là, quelqu'un a accroché une branche d'hibiscus mauve à un clou. Elle se dessèche lentement sous les feux brûlants du soleil. Au sol, une bougie se consume près d'un pot de fleurs jaunes.
«Dégueulasse». Le bar des Amis, juste à côté, est vide et les voitures qui passent devant la stèle ne ralentissent pas. Au café Masseria, dont le patron porte un imposant tatouage de légionnaire, conversation volée entre deux retraités : «Alors, ils ont cassé la plaque !
Ça, c'est vraiment dégueulasse. Les morts, ça se respecte. Je sais pas qui a fait ça, mais ceux-là, ils ne valent même pas la corde pour les pendre.»
L'anathème est accompagné d'une moue écoeurée, tandis qu'un revers de main gifle l'air vers le sol. L'interlocuteur est d'accord : «Pour moi, c'est pas des Corses. C'est pas possible de faire ça ! Les morts, c'est sacré.»
Lorsque l'on cherche à en savoir plus, les visages se ferment. Une troisième personne, un homme d'une trentaine d'années, intervient : «En France, on saccage les sépultures, on profane les cimetières. Ici, ça ne se fait pas. Jamais !»
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