Un pli provisoire plus qu'un parti pris définitif. Jamel Debbouze fronce les sourcils. Il s'irrite plus facilement. C'est manifeste. Il n'a pas renoncé à ses vannes «perforatives» gratuites. Son génie de l'improvisation et sa puissance poético-sémantique subsistent. Mais son humeur, donc son humour, a basculé. Imperceptiblement. Comme un étrange contrepoint à son irrésistible ascension, du chroniqueur hystérique de Radio Nova et Canal + à l'infirmier de H et à l'architecte d'Astérix. Certes, il surjoue l'angoissant retour sur scène après trois ans d'absence. Mais cette volonté de reconquête d'une street credibility n'explique pas seulement sa fébrilité. Il y a visiblement autre chose. Son intranquillité foncière d'insomniaque speedé semble se muer en intranquillité tout court. Sa volonté d'ouvrir les vannes à la politique et à la gravité l'atteste. Ses gimmicks célèbres, «bonjour mesdames et mesdames» ou «shnowmigeness» pour show business, disparaissent au profit de formules socio-coluchiennes : «Quand on n'a aucune chance, il faut la saisir.» Ou «l'ascenseur social est resté bloqué au sous-sol et ça pue la pisse».
Qu'est-ce qui a changé ? Jamel, sûrement. Il a quitté Trappes (93). Sans mauvaise conscience apparente ni sensation d'infidélité. Sa famille y vit encore, dans un pavillon payé par lui. Il y retourne souvent. Depuis sept mois, il habite rue du Four, Paris VIe. Loft poutres apparentes. Home cinema et Playstation pour tout le monde. Quinze amis d'enfance à demeure. L