Lionel Jospin a jugé mi-mai que le mariage est «l'union d'un homme et d'une femme» et «renvoie à la dualité des sexes qui caractérise notre existence et qui est la condition de la procréation». Le sociologue Eric Fassin, professeur à l'Ecole normale supérieure, analyse ce «conservatisme de gauche».
Que vous inspirent les arguments de Jospin ?
Il voudrait que l'Histoire s'arrête, et qu'elle s'arrête avec lui. Il s'enorgueillit du Pacs, qu'il avait pourtant soutenu du bout des lèvres ; mais c'est pour interdire à ses successeurs d'aller plus loin. Autrement dit, le Pacs permettrait d'en finir, une fois pour toutes, avec la politisation de l'homosexualité. Reste à fonder ce choix. Ce n'est pas facile : d'ordinaire, la gauche revendique le mouvement, et non l'immobilisme. Elle se veut progressiste, et non conservatrice. Lionel Jospin reprend à son compte les discours, peu suspects de progressisme, sur «la crise des institutions» (y compris «des Eglises») et sur la «perte des repères», bref sur la décadence. Le risque, c'est d'entrer dans une logique de réaction. Fonder le mariage sur la procréation, c'est revenir au droit canonique pour fonder la société en nature ! Le mouvement de la modernité ne distingue-t-il pas le mariage de la sexualité, de la reproduction et même de la filiation ?
Pourquoi une partie de la gauche s'accroche-t-elle à cette différence des sexes ?
Epousant les analyses de son épouse Sylviane Agacinski, Jospin affirme que l'insti