Les noms sont écrits serrés sur la pierre de Jérusalem, avec la date de naissance et l'année du convoi de déportation vers les camps pour y être assassinés. Au total : 76 000. Il a fallu une calligraphie minutieuse pour inscrire tous ces prénoms et noms sur les murs à l'entrée du nouveau Mémorial de la Shoah, inauguré aujourd'hui par Jacques Chirac (1). Ce sont les 76 000 juifs déportés de France juifs français et juifs réfugiés de toute l'Europe partis entre 1942 et 1944 pour les camps d'Auschwitz, Maidenek, Sobibor... Seuls 2 500 reviendront, pratiquement aucun des 11 000 enfants.
En plein coeur du Marais, quartier qui accueillit pendant des siècles les immigrants juifs venus de l'Est, les déportés ont enfin une sépulture. «Sépulture que n'ont pas eue ceux qui étaient destinés à disparaître, ceux dont il ne reste que le nom», dit Simone Veil, rescapée d'Auschwitz et présidente de la Fondation pour la mémoire de la Shoah. «Nos blessures intimes, ce Mur des noms les garde dans le secret de sa pierre et les livre à ceux qui le longent.»
Eric de Rothschild, président de ce Mémorial de la Shoah, constate «qu'il a fallu soixante ans pour que nous puissions individualiser 76 000 êtres humains qui sont morts parce que juifs». Donner une pierre tombale et rendre une identité aux déportés voués à l'élimination totale, réduits à un numéro tatoué, dont les nazis brûlaient les corps, broyant ensuite les os pour faire disparaître les dernières traces de leur existence. Soixante ans po