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Libération
Interview

Pierre Moscovici, son ministre des Affaires européennes durant la cohabitation.

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Il se tourne vers moi : ""Vous en faites pas, parce que des conneries, hein, qu'est-ce que j'en ai fait ! Et je suis encore là trente ans après !""
publié le 21 avril 2005 à 1h45

Ministre PS des Affaires européennes de 1997 à 2002, Pierre Moscovici a assidûment fréquenté Jacques Chirac pendant cinq ans. Cohabitation oblige, ce proche de Jospin a participé à ses côtés à seize Conseils européens, de très nombreux sommets bilatéraux (avec l'Allemagne, l'Italie, la Grande-Bretagne, etc.) et à toutes sortes de conférences internationales et de voyages officiels. Il dépeint ce chef de l'Etat pas toujours diplomate.

Un vieux sage, Chirac ?

«Non, Jacques Chirac n'est pas sage. Il est le plus ancien dans le grade le plus élevé, il le sait, en use et en abuse. Cette expérience produit un mélange assez étonnant. Au fil des ans, il a construit une pensée robuste à défaut d'être subtile, faite d'un peu de mondialisme, d'une couche d'égoïsme national, de beaucoup de pragmatisme, notamment sur l'Europe, et d'une bonne dose de cynisme quand il s'agit des droits de l'homme. Ce mélange n'est pas sans créer des hiatus entre le discours généreux et une pratique plus restrictive. Mais Jacques Chirac, en politique étrangère, existe. Dire le contraire serait injuste.»

Diplomate, Chirac ?

«Dans les sommets, il peut se montrer charmeur, mais aussi brutal et maladroit. Par exemple, lors du sommet de Berlin, en mars 1999, il avait une seule obsession : la politique agricole commune. "Touche pas à mon blé !", dans les deux sens du terme. Il s'est aliéné tout le monde, y compris Schröder, parce qu'après avoir obtenu tout ce qu'il voulait Chirac a, en plus, réclamé le rétablissement d'une prime à l'abattage des veaux. Il lui