Auteur d'une étude intitulée «Paris à contre-courant», Jean Chiche, chercheur au Centre d'études de la vie politique française (Cevipof), analyse les «paradoxes électoraux» de la capitale (1).
Comment expliquez-vous l'ampleur de la victoire du oui à Paris le 29 mai ?
C'est une tendance : à chaque fois qu'une élection comporte un enjeu européen, les habitants de Paris intra-muros se déplacent massivement aux urnes pour donner une prime à l'idée européenne. Le 29 mai, seuls 4 des 80 quartiers de la capitale ont voté non (Pont de Flandres, La Chapelle, La Goutte d'Or et Belleville). C'est une conséquence de l'indéniable embourgeoisement de la ville, mais pas seulement. Du fait de leurs professions, souvent intellectuelles, de leur niveau d'études et de leurs revenus qui leur permettent de voyager, les Parisiens montrent aussi une grande ouverture aux autres. Toutes les grandes villes universitaires du pays ont voté oui. En ce sens, Paris ne se distingue pas. Disons que la capitale pousse le bouchon un peu plus loin.
Cette «déprolétarisation» de Paris ne l'a pourtant pas empêché d'élire un maire de gauche en 2001...
Hormis le fait que la droite s'est présentée très divisée à ces municipales, il ne faut pas oublier que le taux de chômage à Paris (11,5 %) est plus important que dans le reste du pays, que les propriétaires y sont moins nombreux qu'ailleurs (30 % contre 55 % en France) et que de nombreux habitants, tout en affichant un haut niveau de qualification, disposent de revenus