Abdel fait le malin. Normal : c'est lui qui tient le micro. Il est un peu plus de huit heures, hier matin, devant la grille du lycée Eugène-Delacroix de Drancy (Seine-Saint-Denis). Dans cette petite ville de banlieue, les lycéens disent «Delac». Depuis une semaine, Abdel est le «boss» de Delac. Celui qui donne les mots d'ordre, les lieux de rendez-vous. Ce matin, l'élève en terminale bac professionnel, la voix éraillée pour avoir trop gueulé «non au CPE, oui au CDI», appelle au calme. «Pas de casse», demande-t-il. Depuis qu'ils ont fait mouvement, les lycéens de Delac et du bahut professionnel voisin, Le Rolland, illustrent le risque d'un nouvel automne au printemps. C'est-à-dire d'une autre flambée de violence en banlieue, comme en novembre. A tel point que Nicolas Sarkozy, expert ès «racailles», a cru bon de faire état mercredi du «danger» d'un réveil de «l'agitation dans les banlieues qui restent toujours extrêmement tendues».
En une petite semaine, ici, trois voitures ont brûlé, une dizaine d'autres ont été fracassées, du mobilier urbain a été détérioré, des commerçants agressés. Maire UDF de Drancy, Jean-Christophe Lagarde ne veut pas être alarmiste : il y a cinq mois, sa cité a été épargnée et il aimerait bien que cela dure. Cependant, Lagarde, qui est opposé au CPE, estime : «Nous sommes dans la même situation qu'au début de l'automne dernier : les ingrédients des émeutes sont là. Il suffit de quelques crétins pour que cela dégénère.»
«Débordements». Un