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Libération

Pour l'armée, Dreyfus reste une affaire.

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publié le 12 juillet 2006 à 21h56

Alfred Dreyfus aimait l'armée française, mais celle-ci l'a bien mal payé en retour. Un siècle après la réhabilitation de l'officier, c'est une indifférence mêlée d'agacement qui domine dans la communauté militaire. Dreyfus ? Un cadavre dans le placard dont on préfère ne pas parler, alors que le chef de l'Etat ­ et chef des armées ­ préside ce matin une «cérémonie nationale» d'hommage à l'officier, dans la cour de l'Ecole militaire, à Paris. Là même où Alfred Dreyfus fut dégradé, puis réintégré dans l'armée, le 13 juillet 1906.

«Ça fait mal, ce truc-là...», ironise le général André Bach, auteur de l'Armée de Dreyfus (Tallandier, 2004). «L'institution militaire cultive le narcissisme communautaire et elle pense en mode binaire, explique l'ancien directeur du Service historique de l'armée de terre, aujourd'hui à la retraite. Concernant l'affaire Dreyfus, les militaires se disent : les dreyfusards n'aimaient pas l'armée. Donc on s'en méfie...» Et le général Bach de citer le général de Gaulle : «Souvent les militaires, s'exagérant l'impuissance de l'intelligence, négligent de s'en servir.»

«Chiffon rouge». Alfred Dreyfus n'avait pourtant rien d'un antimilitariste.Meurtri de ne pas voir ses années de bagne comptées dans son ancienneté ­ ce qui, de facto, lui fermait l'accès aux grades les plus élevés ­ il renonça à sa vocation militaire. Jusqu'à la guerre de 14, car, animé d'un profond patriotisme, le chef d'escadron Dreyfus repris alors du