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Libération
Critique

Les faits sur Battisti

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Réaction à l'article de «Libération» sur une victime des années de plomb en Italie.
par Fred VARGAS, écrivaine.
publié le 27 octobre 2006 à 23h50

Rien de plus normal et justifié que Libération publie (lundi 23 octobre, sous la plume d'Eric Jozsef) un article sur le livre d'Alberto Torregiani, fils du bijoutier abattu par des membres des PAC (Prolétaires armés pour le communisme) à Milan en 1979, enfant dramatiquement touché au cours de la fusillade et demeuré paraplégique. Rien de plus douloureux et compréhensible que la souffrance et la colère de cet enfant devenu homme. Mais rien de plus navrant quand Libération cesse de faire son travail et accepte de tromper ses lecteurs par omission.

Et puisque Libération ne désire rapporter l'intégralité des propos d'Alberto Torregiani, à d'autres de le faire en leur place : Cesare Battisti n'était pas sur les lieux de l'attentat, et l'enfant fut touché par une balle perdue de son propre père. Faits reconnus par la justice italienne elle-même, faits reconnus par Alberto Torregiani, faits soigneusement écartés de l'article. Pourquoi ? En 2004, la propagande italienne, puis française, s'efforça, et parvint avec succès, à faire croire à l'opinion publique que Battisti lui-même avait tiré sur cet enfant. Ainsi devint-il pour tous un «monstre», un «tueur d'enfant». Après quoi son extradition n'était plus qu'une formalité. Tous les efforts pour anéantir ce mensonge furent vains. Pourquoi Libération ne livre-t-il pas aujourd'hui à ses lecteurs cette vérité? Et quel maître servent donc les journalistes ? La rumeur, la haine aveugle, ou bien l'Histoire