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Libération

Bernard Frank mort chronique

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L'auteur de «Solde», qui fit de ses livres et de ses articles une conversation stylée, est mort à 77 ans.
publié le 6 novembre 2006 à 23h58

L'élégance a perdu un homme. Bernard Frank est mort vendredi soir dans un restaurant parisien près de chez lui. Il avait 77 ans. Il aimait lire, converser, boire et manger. Une crise cardiaque l'a emporté. «C'est devenu une plaisanterie, écrivait-il en 1984. Nous mourrons tous du coeur, un jour ou l'autre. Mais le coeur n'est pas notre préoccupation. Un coeur qui flanche, c'est la belle mort. Cet organe est bonasse.»

Le soir de sa mort, un ami médecin dînait en sa compagnie. «[A l'écrivain], ajoutait Frank en 1996, le médecin [...] semble l'intermédiaire rêvé entre lui, la société et l'existence. Toute sa vie, l'écrivain ne fait que délivrer des ordonnances, et le médecin est un peu son secrétaire, celui qui a le tampon. C'est dire si le choix d'un médecin, ou de plusieurs, compte dans l'exercice de notre métier.»

Tradition. C'est le talent de certains écrivains que de donner à vivre en prévoyant qu'ils vont mourir. Pendant cinquante ans, Bernard Frank l'a fait sansdésemparer, mais légèrement, dans la tradition de Montaigne et de Diderot : «Un écrivain, disait-il, c'est quelqu'un qui découvre son mode d'emploi dans ses livres. Un je de fortune.» Lui s'invente en se répétant : ses livres sont le mode d'emploi d'une vie qui se reconstruit sans cesse, rétrospectivement, à travers eux.

Lu aujourd'hui, ce mode d'emploi est simple. Des années 50 aux années 90, Frank est le premier chroniqueur français des époques